Neuvaine – Jour 4 – « La Lumière est miséricorde » (dimanche 13 mars)

C’est aujourd’hui ma toute première messe dans la basilique. Je connaissais évidemment l’endroit pour l’avoir visité en tant que « touriste », mais je n’y avais jamais assisté à un office.  J’ai d’abord une sensation de froideur : tout, dans cette basilique, est moderne et frappé de gigantisme. À priori, il est difficile pour moi donc de ressentir la proximité et la chaleur que je trouve chaque fois à la crypte…

Après les prières et les chants consacrés à la neuvaine, la messe commence et les prêtres  entrent en procession. Je comprends finalement en quoi la grandeur de cette basilique peut aussi être synonyme de beauté, en voyant le père Jomon Kalladanthiyil  encenser l’immense croix qui surplombe l’autel. Les maigres volutes d’encens qui s’envolent si bas me paraissent bien minimes et dérisoires envers ce gigantesque Jésus crucifié. Dérisoires, mais pas insignifiants. Cela me ramène à ce que nous sommes réellement, à notre échelle, et à l’humilité qui devrait en découler.

Le père Claude Grou nous rappelle dans la première lecture que, pendant l’exil du peuple juif, beaucoup regardaient en arrière en se disant : « C’était mieux avant ». Isaïe leur dit au contraire de porter leur regard devant, car « Dieu prépare des jours nouveaux ». Mais après le retour d’exil du peuple juif, de nouvelles persécutions ont lieu : beaucoup ne croient plus en ce Dieu qui avait tant promis à son peuple. Certains gardent espoir et continuent d’attendre, comme par exemple Joseph qui gardait l’espérance en lui… sans se douter de la mission qui l’attendait.  Joseph a eu son lot d’épreuves, Joseph ne comprenait pas tout, mais il a fait confiance. 

L’Évangile du jour nous raconte l’épisode de la femme adultère. Les pharisiens ne laissent pas de place à la miséricorde. Mais un homme, Jésus, refuse de condamner. Il ne discute pas de la culpabilité de la femme adultère, mais il se tourne vers les hommes en les invitant à regarder leur propre vécu. Par sa miséricorde, Jésus ouvre un nouveau chemin, un chemin de libération.

Neuvaine – Jour 5 – « La Lumière est présence » (lundi 14 mars)

Curieuse impression aujourd’hui en attendant le début de la messe. Je n’ai pourtant manqué aucun jour de neuvaine, mais je ressens un manque, je suis pressée qu’il soit 14 h et j’ai hâte que la célébration commence. Hâte de célébrer Joseph, de poursuivre ce chemin vers le 19 mars.  À priori, je suis loin d’être la seule : l’assemblée se fait chaque jour de plus en plus nombreuse.  Pour ce cinquième jour de neuvaine ayant pour thème « La Lumière est Présence », les pèlerins eux aussi ont répondu présents.

Comme chaque fois, la messe est précédée d’un temps de prière à saint Joseph, avec nos intentions personnelles. Puis vient le temps de la célébration, présidée par le père Jean-Baptiste Vérité, originaire du Togo. C’est à lui, en particulier, que je dois d’être toute émue pendant la célébration. D’abord, au moment de la paix du Christ. La liturgie habituelle qui précède le geste de paix dit ceci : « Pour que ta volonté s’accomplisse, donne-lui toujours cette paix et conduis-la vers l’unité parfaite, Toi qui règnes pour les siècles des siècles ». Ai-je mal entendu ? Ou le prêtre a-t-il volontairement changé le texte ordinaire ? J’entends, en tous les cas, « Toi qui nous aimes pour les siècles des siècles » et cela me transperce.

Le second moment qui me remue profondément a lieu juste après, lors de la procession du Saint Sacrement. Par ces mots, un prêtre explique au pupitre ce qui va se passer : « Jésus, présent dans l’eucharistie, va passer parmi nous, comme il le faisait jadis sur les routes de son pays (…) Prions-le avec adoration, spécialement pour toutes les formes de maladie ». Sur fond de « Ubi Caritas », le père Vérité entame la procession, tout imprégné et pénétré de ce qu’il s’apprête à faire. La lenteur et la dignité de ses gestes au moment de tracer le signe de croix avec l’ostensoir me met les larmes aux yeux. Je suis face à Jésus, je vois le visage du Sauveur qui se tient là, devant nous, qui me regarde et qui me dit : « Ne crains pas. Je suis là ». Puis c’est au tour des prêtres de s’incliner devant le Ressuscité. Je vois mon voisin s’essuyer les yeux. Lui aussi. 

À la fin de la célébration, alors que les prêtres sortent en procession par la Porte de la Miséricorde, j’aperçois une dame agenouillée; elle salue d’un regard rempli d’amour, de douceur et de tendresse la croix qui passe juste devant elle, elle lui lance des baisers, elle lui sourit, ses yeux lui crient : « Je t’aime ». Je m’essuie les yeux à nouveau.

Neuvaine – Jour 6 – « La Lumière est salut » (mardi 15 mars)

Pour ce sixième jour de neuvaine, je décide de m’offrir avant la messe une visite guidée de l’Oratoire. Une heure et demie passionnante passée à mieux connaître saint frère André et ces lieux que j’affectionne déjà tant. Je me rends ensuite à la prédication de 14 h; encore aujourd’hui,  la crypte est pleine…

Isaïe annonce à la première lecture la venue d’une lumière qui vient dissiper les ténèbres et vers laquelle tous les peuples marcheront. Me revient alors à l’esprit ces deux versets de l’Évangile : « Je suis la lumière du monde » (Jean 8:12) et « Vous êtes la lumière du monde » (Matthieu 5:14). De prime abord, j’ai l’impression que ces phrases s’opposent, à cause de l’usage soutenu et affirmatif du « Je » et du « Vous », l’un semblant exclure l’autre. Mais nous avons en commun d’être cette « lumière » ! Ne craignons donc pas de fusionner ce « Vous » et ce « Je » en un « Nous » lumineux ; nous unir au Christ, voilà ce à quoi nous sommes appelés.

Assise au dernier rang, je ne pensais pas que la procession du Saint-Sacrement (qui a lieu chaque jour entre la paix du Christ et l’Agneau de Dieu), parviendrait de nouveau à me soutirer quelques larmes. Mais il n’y a rien à faire, depuis l’ostensoir, voir Jésus nous embrasser du regard en nous disant : « Ne craignez pas, Je suis là » m’émerveille. La personne devant moi lève timidement une photo d’identité, en essayant de faire en sorte que Jésus l’aperçoive du fond de la crypte. Je ne sais pas pourquoi cela me touche autant. Son geste de foi est discret, modeste, sans tapage, mais tout empreint d’une confiance simple envers Jésus. La foi de Joseph n’était-elle pas ainsi aussi ?