Alfred Bessette : Novice (1870-1874)

C’est le 27 décembre 1870, quelques semaines à peine après son arrivée au Collège Notre-Dame, que le jeune Alfred Bessette entre au noviciat de la Congrégation de Sainte-Croix1. Vêtu de la soutane des Frères et ceinturé du double cordon, Alfred prononce ses vœux d’engagement devant le maître des novices, le père Julien Gastineau, c.s.c. C’est pendant cette cérémonie qu’il prend le nom de frère André.

Frère André : Novice

4-1 Frère André, novice. Vers 1870. Photographe inconnu.
Archives de l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal.

Au cours des deux années suivantes, le frère André se consacre aux apprentissages d’une vie nouvelle pour laquelle rien ne l’a vraiment préparé. Mais l’intuition du curé André Provençal qui voyait dans le jeune homme un candidat idéal pour les travaux manuels chez les Frères de Sainte-Croix l’habite et l’enchante.

Il est loin d’une vie oisive! Les postulants, comme les novices, sont mis à l’épreuve afin de ne retenir que ceux qui sont entièrement prêts à consacrer leur vie au service des œuvres de la Congrégation. Les Règles capitulaires de la Congrégation de Sainte-Croix de 1873 peuvent nous en donner une idée. Les journées sont bien remplies :

« 4 heures et ½. Lever. – 5h. Prières vocales et méditées. – 5h. ½. Messe, à la fin de laquelle on récite sept Pater, sept Ave et sept Gloria en l’honneur des sept Allégresses et des sept Douleurs de saint Joseph, après quoi étude en hiver, et travail des mains en été. – 7h. ½, Déjeuner, suivi des travaux manuels. – 9 heures ½. Étude. – 10 heures ½. Classe. – 11 heures ½. Chant. 11 heures ¾. Examen particulier. – Midi. Diner, puis récréation… »2.

En après-midi, les périodes de travaux et d’études se départagent selon les saisons, toujours entrecoupées de la récitation des sept Pater, Ave et Gloria. Arrive enfin à 20 h 30 le chapelet, la prière et le coucher. Ces règlements visent à inculquer une « vie surnaturelle » totale et surtout à enraciner dans la pratique des jeunes religieux « des habitudes qui seront celles de toute une vie »3.

Novice, le frère André doit de plus s’accommoder d’une heure de méditation matin et soir, de la récitation du Bréviaire en commun (pour remplacer les sept Pater, Ave et Gloria), de l’étude de l’Écriture et de l’Histoire sainte, des Règles, du Directoire, du Catéchisme, de la pédagogie, des cérémonies et du chant. Heureusement il peut faire une promenade « une fois la semaine » et profiter « d’une retraite d’un jour à la fin du mois »4.

Nous ne savons pas comment le frère André, qui a reçu une éducation très sommaire, a fait face à cette charge d’étude. Azarias Claude, grand ami du frère André, a déclaré lors du procès informatif qu’il était « peu instruit, savait lire et à peine signer son nom ». Un autre témoin rapporte que le frère André pouvait lire et qu’il avait sans doute développé cette compétence lors de son noviciat5.

Dans tous les cas, cette période de formation intellectuelle sera de courte durée. Le 27 juillet 1871 le frère André reçoit sa première obédience : infirmier, linger, chargé du corridor de la communauté. Puis en décembre s’ajoutent les charges de portier, lampiste, de nettoyer « la chapelle, les corridors, les chambres, les escaliers, etc. » en plus de devoir monter le bois dans les chambres6.

On eut bien des doutes sur la capacité du frère André à faire sa profession. On la lui refuse d’ailleurs une première fois en janvier 1872 prétextant que sa santé est trop mauvaise. Grand découragement du frère André qui pensait bien avoir trouvé son état de vie ! Heureusement, d’autres religieux de la Congrégation de Sainte-Croix de même que Mgr Ignace Bourget l’encouragent dans sa persévérance.

L’arrivée du père Amédée Guy, c.s.c. au poste de maître des novices et son affection pour le jeune homme seront providentielles. C’est lui qui dira du frère André : « Si ce jeune homme devient incapable de travailler, il saura du moins très bien prier. »7. Le 22 août 1872 le frère André prononce enfin ses vœux temporaires. Sa profession perpétuelle se fera moins de deux ans plus tard, le 2 février 1874.

Frère André au moment de ses vœux perpétuels

5-1 Frère André au moment de ses vœux perpétuels, 1874. Photographe : Henri Larin.
Archives de l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal

Façade du Collège Notre-Dame.

9-1 Façade du Collège Notre-Dame. Date et photographe inconnus. Archives de l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal.
La cellule du frère André se trouvait près de la porte à droite de la photographie.

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1 Alfred Bessette est d’abord reçu comme postulant, le 22 novembre 1870, un titre qu’il n’aura que pendant quelques semaines. Étienne Catta, Le frère André 1845-1937. Montréal : Fides, 1965, pp.167-168
2 Règles capitulaires de Congrégation de Sainte-Croix. Le Mans : Typographie Ed. Monnoyer, 1873, p. 7
3 Catta, op.cit., p. 171
4 Règles capitulaires…, op.cit., 11
5 Index du Summarium. Montréal : Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal, 1999, pp. 152-153
6 Catta, op.cit., 176
7 Ibid., p. 180